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Décision annulant la loi sur le report de la Présidentielle 2024 : Quelles perspectives pour le Pds et son candidat ?

Rédigé par leral.net le Mercredi 21 Février 2024 à 17:24 | | 0 commentaire(s)|

La dernière décision du Conseil constitutionnel, annulant la loi adoptée par l’Assemblée nationale pour le report de la présidentielle, est un autre obstacle à la candidature de Karim Meïssa Wade, qui ne figure pas sur la liste définitive des candidats. Selon des analystes, le Parti démocratique sénégalais (Pds) devra choisir son camp, même si cela […]

La dernière décision du Conseil constitutionnel, annulant la loi adoptée par l’Assemblée nationale pour le report de la présidentielle, est un autre obstacle à la candidature de Karim Meïssa Wade, qui ne figure pas sur la liste définitive des candidats. Selon des analystes, le Parti démocratique sénégalais (Pds) devra choisir son camp, même si cela sera compliqué, compte tenu des relations qu’il entretient avec le pouvoir comme dans l’opposition.

Après la publication par le Conseil constitutionnel de la liste définitive des 20 candidats autorisés à participer à l’élection présidentielle, initialement prévue le 25 février, sans le candidat Karim Meïssa Wade, le Parti démocratique sénégalais (Pds) avait engagé le combat. Comment le Pds va aborder son avenir avec la dernière décision du Conseil constitutionnel annulant le report de la présidentielle ?  La question est d’actualité, d’autant plus que ce parti risque de ne pas avoir de candidat pour le prochain scrutin.

Au lendemain de la publication de la liste définitive des candidats, le groupe parlementaire « Liberté, Démocratie et Changement », évoquant des soupçons de corruption contre deux membres du Conseil constitutionnel, avait présenté une résolution, adoptée, le 31 janvier 2024, par 120 voix contre 24, pour la mise en place d’une commission d’enquête parlementaire afin d’éclaircir les conditions de l’élimination de Karim Wade et autres de l’élection présidentielle. Cela avait entrainé, dans la foulée, l’annonce du Chef de l’État, Macky Sall, qui avait pris le décret n° 2024-106 du 3 février 2024 abrogeant le décret convoquant le corps électoral pour l’élection présidentielle du 25 février 2024. Le 5 février 2024, l’Assemblée nationale avait voté la loi portant dérogation aux dispositions de l’article 31 de la Constitution adoptée sous le n° 4/2024 ; ce qui avait acté le report de la présidentielle du 25 février 2024.

Le parti fondé, en 1974, par le troisième Chef de l’État du Sénégal, Me Abdoulaye Wade, espérait ainsi qu’avec la reprise du processus électoral, la candidature de Karim Wade serait validée. Ce dernier était sur la liste provisoire des candidats, mais a été enlevé de la liste définitive publiée par le Conseil constitutionnel, le 20 janvier 2024, à cause d’une affaire de binationalité franco-sénégalaise suite à un recours introduit par le candidat Thierno Alassane Sall.

Cependant, le jeudi 15 février dernier, le Conseil constitutionnel a pris une décision annulant ce report, jugeant « que la loi portant dérogation aux dispositions de l’article 31 de la Constitution, adoptée par l’Assemblée nationale en sa séance du 5 février 2024, est contraire à la Constitution ».

Avec cette décision, le Conseil a demandé à l’autorité d’organiser la présidentielle dans « les meilleurs délais ». La liste définitive des candidats devrait être maintenue, car le Conseil a demandé la poursuite du processus. Cela fait que le Pds est le grand perdant dans cette affaire, d’après certains observateurs.

Demba Guèye, Maître de conférence en Analyse du discours à l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar (Ucad) et analyste politique, a indiqué que « pour ce qui concerne la décision du Conseil constitutionnel confirmant la tenue de l’élection présidentielle, il est évident que le plus grand perdant reste le Pds qui n’aura pas de candidat ». Pour lui, l’annulation du processus électoral leur permettrait de se remettre en course : ce qui n’est pas le cas.
Même avis chez Serigne Thiam, Enseignant-chercheur à la Faculté des Sciences juridiques et politiques (Fsjp) de l’Ucad, qui confirme que « le constat est alarmant pour le Pds » qui « n’aura pas de candidat pour l’élection présidentielle de 2024 » si on s’en tient à la dernière décision du Conseil constitutionnel. « Ce sera le même scénario qu’en 2019 », rappelle Dr Thiam.

Les options qui s’offrent au Pds

N’ayant plus de candidat, Demba Guèye pense que le Pds est dans l’obligation de se déterminer pour les élections. Pour lui, les libéraux ont trois options : soutenir la mouvance présidentielle, soutenir l’opposition ou rester neutre comme lors de la présidentielle de 2019. Chacune de ces options, dit-il, comporte des avantages et des inconvénients. Pour l’analyste politique, l’alliance du Pds avec la mouvance présidentielle permettrait un partage du pouvoir en cas de victoire. « Ce qui n’est pas négligeable en politique, car cela permet au parti qui en bénéficie de placer ses cadres dans l’appareil administratif et de leur donner les moyens de massifier le parti », explique-t-il. M. Guèye renchérit aussi que le Pds peut tirer le même bénéfice en faisant alliance avec l’opposition. « Mais, en cas de victoire de l’opposition, le Pds serait moins servi qu’avec la mouvance présidentielle. En effet, le nombre de coalitions qui iront avec l’opposition sera forcément plus important qu’avec la majorité présidentielle. Autrement dit, le Pds gagnerait plus en soutenant la majorité présidentielle », souligne le Maître de conférences.

Position inconfortable des libéraux 

Par contre, ajoute Demba Guèye, il y a des risques importants pour le Pds de soutenir la majorité présidentielle. Le premier risque, selon lui, est lié « au probable décrochage de son électorat qui est fondamentalement un électorat d’opposition ». En plus de cela, il sera difficile, à son avis, de faire avaler aux électeurs du Pds la pilule « Benno Bokk Yaakaar » qui est la cause de tous les déboires politiques de Karim Wade depuis 2012 : emprisonnement, exil, perte des droits civiques, absence de candidat aux élections présidentielles de 2019 et, peut-être, de 2024.
« Amadou Ba, candidat de « Benno Bokk Yaakaar », a été aussi accusé par le Pds comme présumé corrupteur de juges du Conseil constitutionnel.
Compte tenu de tout cela, il sera pratiquement impossible pour les autorités du Pds de justifier un soutien du candidat Amadou Ba », fait remarquer M. Guèye.

L’Enseignant-chercheur Serigne Thiam, soutient la même thèse. Il admet qu’il sera très difficile pour les libéraux de choisir un camp parce qu’ils ne sont en odeur de sainteté ni avec « Benno Bokk Yaakaar », car ayant accusé « Amadou Ba de corrupteur, ni avec l’opposition en souhaitant le report des élections » combattu par les opposants et la société civile.

Cependant, poursuit-il, « cela n’exclut pas qu’ils puissent appuyer un camp ». Q. Thiam pense profondément que le Pds est plus proche de la majorité présidentielle vu leur rapprochement avec le groupe parlementaire de « Benno Bokk Yaakaar » lors du vote de la résolution sur la mise en place de la commission d’enquête parlementaire, mais aussi de la loi reportant la présidentielle. « Au-delà des clivages politiques, le Pds et l’Apr veulent le regroupement des libéraux, comme l’a souhaité Me Abdoulaye Wade », tranche-t-il.

Par ailleurs, l’universitaire prévient que les autres coalitions de l’opposition vont tout faire pour avoir l’appui du Pds. Voir aussi le Pds avec l’opposition est une possibilité, à en croire Demba Guèye, « car au Sénégal, les électeurs oublient vite les déboires du passé ».

En définitive, l’analyste politique croit que l’option de la neutralité du Pds peut être posée sur la table par les libéraux, mais elle est aussi risquée puisque les électeurs « peuvent se désabonner », vu que leur formation politique n’a pas eu de candidat dans une présidentielle depuis la perte du pouvoir par son fondateur, Abdoulaye Wade, en 2012.

De toute façon, ce parti historique qui a « plusieurs vies » n’a pas dit son dernier mot. Mayoro Faye a d’ailleurs martelé que le Pds et les partis du Front démocratique pour une élection inclusive (Fdpei) demandent la reprise de tout le processus électoral, pour une élection avec Karim Wade et les candidats spoliés.

Oumar KANDÉ 

 

La coalition « Karim 2024 » exige la reprise du processus  

 Elle a décidé de répondre à l’appel au Dialogue du Président de la République. Lors d’un point de presse, organisé lundi 19 février, à la permanence du Parti démocratique sénégalais (Pds), la coalition « Karim 2024 » a donné sa position et appelle à la création d’une Cour constitutionnelle en remplacement de l’actuel Conseil constitutionnel.

« Le Pds et la coalition « Karim 2024 » participeront pleinement au Dialogue national annoncé par le Président de le République ». L’annonce a été faite, lundi 19 février, par le président du groupe parlementaire des libéraux, Mamadou Lamine Thiam.

Estimant « injuste » la décision du Conseil constitutionnel d’écarter Karim Wade de la course à la présidence pour binationalité, la coalition « Karim 2024 » voit en ce Dialogue un moyen d’obtenir réparation. En effet, les partisans du candidat recalé soutiennent que le processus électoral a connu des dysfonctionnements qui ont amené au report de l’élection, décision qui a finalement été cassée par le Conseil constitutionnel la semaine dernière.

Selon M. Thiam, il est important de tenir des concertations larges, afin que les candidats qui estiment avoir subi une « injustice » puissent obtenir réparation. Le Pds continue de soutenir que le processus électoral qui est contesté depuis l’étape de la vérification des parrainages doit être repris, pour une élection présidentielle inclusive.

La coalition « Karim 2024 » « exige que ce Dialogue national se tienne sans délai afin d’organiser et de garantir une élection présidentielle apaisée, inclusive, transparente et non contestable ». En outre, elle réitère sa volonté de remplacer l’actuel Conseil constitutionnel par une Cour constitutionnelle. D’après le président du groupe parlementaire des libéraux, il faut remédier au caractère incontestable des décisions de cette haute juridiction. Il estime que la situation actuelle aurait pu être évitée s’il était possible de déposer un recours contre la décision éliminant Karim Wade.

Par ailleurs, le Pds demande à ses militants et comités électoraux de rester mobilisés, en attendant l’élection présidentielle « dont la nouvelle date sera fixée par le Président de la République ». La coalition « Karim 2024 » appelle aussi l’ensemble des responsables et militants « à rester unis et mobilisés pour réserver un accueil populaire sans précédent » à leur candidat, Karim Wade, et lui assurer une brillante victoire à l’élection présidentielle ».

Assane FALL



Source : https://lesoleil.sn/decision-annulant-la-loi-sur-l...